Il est des soirs où l’angoisse s’invite sans frapper. Elle s’étire dans nos pensées comme une brume lente, répétant en boucle que quelque chose va mal tourner.
Et si ce que nous appelons “inquiétude” était parfois le masque bien construit de la solitude ? Un stratagème inconscient pour ne pas affronter le vide de l’absence ?
On est seul dans une maison trop silencieuse. Les amis sont ailleurs, en famille, en soirée. Nous, on est là, allongé, figé. Et dans ce désert affectif, notre esprit trouve un moyen de se faire remarquer : il crée de la panique. Un mail mal formulé, un souvenir honteux, un diagnostic imaginaire… tout est bon pour avoir l’illusion qu’on est au centre de quelque chose. Même si ce “quelque chose” est menaçant.
Il se pourrait que, sans le vouloir, nous préférions la persécution à l’abandon. Sentir que l’on nous en veut, c’est encore sentir qu’on pense à nous. L’esprit humain est prêt à endurer mille angoisses, tant qu’il échappe au vide absolu. Un vide affectif, sensoriel, existentiel.
On se convainc alors qu’on est visé, fautif, en danger. Cela donne un sens à l’isolement. On a même l’impression de mériter notre solitude.
Quand as-tu parlé à quelqu’un pour la dernière fois ? Depuis combien de temps es-tu seul(e) avec toi-même ? Te sens-tu en lien avec quelqu’un en ce moment ?
Ces simples questions dévoilent souvent que l’inquiétude est le symptôme d’une relation manquante. Que notre cœur crie, non pas de peur, mais de manque d’attachement sécurisant.
Plutôt que d’y croire aveuglément, on peut apprendre à l’écouter autrement.
“Je me sens en danger” peut vouloir dire : “je me sens seul(e) et j’aimerais qu’on soit là pour moi”.
Alors, on peut s’asseoir avec cette angoisse, comme on le ferait avec un ami inquiet. On ne juge pas. On reste. On écoute. On dit :
“Je suis là. Je te vois. Ce n’est pas la fin du monde. C’est juste un appel d’amour sans réponse.”
La prochaine fois que tu sens l’angoisse monter, pose-toi cette question presque poétique :
“Et si, en fait, je me sentais juste terriblement seul(e) ?”
Ce simple basculement de regard pourrait être le premier pas vers un apaisement profond. Car ce n’est pas toujours la peur qu’il faut rassurer. C’est le besoin de lien qu’il faut entendre.